À quoi servent les diplomates 

Posté le 02/11/2023  

C’est dans une salle bien remplie des « Catherinettes » à Colmar, que s’est tenue ce jeudi 2 novembre à 19h00, la conférence de Daniel Jouanneau, ancien ambassadeur, sur le thème : « À quoi servent les diplomates ? ».




Organisée par l’association « Imagin’ Colmar », il est revenu à Claudine Ganter la mission de présenter le conférencier. C’est en effet un parcours impressionnant qu’a accompli le diplomate durant toute sa carrière. Ancien élève de l’École Nationale d’Administration, il a été notamment ambassadeur au Mozambique, Liban, Canada et Pakistan. Il a servi comme chef du Protocole sous l’autorité des présidents François Mitterrand et Jacques Chirac. Il a dirigé ensuite l’Inspection générale des affaires étrangères.

Claudine Ganter et Daniel Jouanneau

La diplomatie au service de la politique étrangère
L’ancien haut-fonctionnaire s’est ensuite exprimé dans un exposé de 45 minutes en faisant bien le distinguo entre la diplomatie qui est une mission régalienne et la politique étrangère fixée par le président de la république et son exécutif. « Les diplomates sont des exécutants » a insisté l’orateur mais en ajoutant la grande liberté d’action et d’imagination dont ces derniers doivent faire preuve. Et pour Daniel Jouanneau, c’est ce qui a fait la passion de son métier. « C’est surtout un travail d’équipe » a tenu à préciser celui qui a maintes fois représenté le chef de l’État à l’étranger. En effet, dans une ambassade, il y a seulement trois diplomates : l’ambassadeur, son premier conseiller et son premier secrétaire. Ce « staff » est entouré de conseillers et attachés qui sont des fonctionnaires ou militaires détachés par leur ministère de tutelle (Défense, Intérieur, économie, éducation nationale…). On imagine pas un seul instant une dissonance entre ces services. « Que se passerait-il, si l’ambassadeur dit que tout va bien pour les entreprises françaises dans le pays hôte alors que le conseiller commercial dirait le contraire à Bercy ? » souligne l’ancien énarque. « Il faut faire l’effort d’apprendre la langue du pays d’accueil même un tout petit peu. » aime-t-il à dire. Pour preuve, Daniel Jouanneau illustre son propos d’une anecdote dans une université du Pakistan où pour briser la glace, il s’était adressé aux étudiants et étudiantes avec quelques mots en patois local. Ce qui lui a voulu des sourires et des applaudissements de la part d’un auditoire très hostile au départ.



Les diplomates travaillent pour la paix et dans la paix
Les échanges et les négociations sont le cœur du métier. Mais il arrive que la guerre détrône la diplomatie. C’est le cas lors des ruptures diplomatiques entre deux pays. Et pour autant, le travail diplomatique continue car il faut réaliser toute un travail d’évacuation des ressortissants, d’aide humanitaire et préparer aussi l’après. Quand une guerre prend fin, il y a une conférence internationale pour reconstruire. Le conférencier a démontré toute la capacité d’analyse dont font preuve les diplomates en passant en revue plusieurs conflits actuels dans le monde susceptibles d’embraser l’équilibre fragile de la paix. Dans son exposé, il a également évoqué une diplomatie multilatérale, celle des grandes conférences internationales et la diplomatie bilatérale, celle des ambassades institutionnalisant les relations entre la France et le pays hôte. Il a préféré clairement cette dernière qui l’a amené à la rencontre des peuples plutôt que le confinement dans les salles de négociations multilatérales internationales.

échanges entre Daniel Jouanneau et Eric Straumann maire de Colmar

La mairie des français de l'étranger
« Le consulat c’est la mairie des expatriés. Nous sommes les seuls à fournir très largement presque partout dans le monde un service d’état-civil à la population française vivant dans le pays d’accueil. » précise l’ancien ambassadeur. « Nous avons de plus en plus de pauvres qui bénéficient des mêmes aides qu’un CCAS de ville. » ajoute-t-il. « De plus le réseau des lycées français dans le monde est le plus étendu et pratiquement unique en son genre. » conclue-t-il.

La conférence s’est suivie par un échange de questions et réactions d’une vingtaine de minutes. Parmi celles-ci figure l’inquiétude de la dissolution du corps diplomatique qui pourrait laisser place à une système similaire à celui des États-Unis. Un clientélisme pourrait nuire à l’excellence du corps en extinction. Daniel Jouanneau a rappelé que l’administration des affaires étrangères est un corps très petit de seulement 15000 fonctionnaires avec des moyens très limités représentant seulement 1 % du budget de l’état.

Vente et dédicace de livres à l'issue de la conférence