Daniel Nevot repose au RMT

Posté le 08/09/2022  

Les cendres de Daniel Nevot reposent désormais, selon ses dernières volontés, dans le monument qu’il a lui-même offert au Régiment de Marche du Tchad à Meyenheim.

Il est 16 h, la colonne entre dans le quartier Dio du Régiment de Marche du Tchad sur l’ancienne base aérienne 132 à Meyenheim. En tête, dans une Jeep militaire américaine, Patricia, la fille du défunt, est assise devant. À l’arrière, deux sous-officiers, assis, tiennent les cendres d’un des témoins du serment de Koufra. Au même moment, un avion de collection, similaire à ceux qui ont transporté ce combattant de la France Libre, passe à la verticale du poste de commandement, en reconnaissance de celui qui entre dans l’histoire. Une grosse limousine américaine avec à l’arrière son épouse Helen fait son entrée.

Accueilli par le colonel de Sorbier, chef de corps, le cortège à pied se forme, sans protocole, avec dignité et respect, et se dirige vers le monument que Daniel Nevot a offert au régiment en 2010, un peu après l’installation de ce dernier en Alsace. La haie d’honneur formée des cadres officiers et sous-officiers, les saluent au passage.



Fait de bric et de broc et de tout ceux que l’on trouve sur le chemin

C’est le moment solennel. Un trou a été creusé dans le socle du monument. Les cendres y sont disposées. Quel symbole ! Les deux statues résument toute l’histoire du régiment du « serment » : un tirailleur sénégalais et un marsouin. Au pied de la statue, là ou Daniel Nevot la sacralise avec ses reliques, les deux sergents entourent la plaque commémorative, comme une réplique. Ils sont les témoins de la diversité culturelle constitutive du régiment.



La sonnerie Aux morts retentit en mémoire du héros qui repose, mais aussi de tous ceux que Malraux surnommait « les clochards épiques de Leclerc ». C’est cela un régiment de marche ! Il est fait de bric et de broc et de tout ce que l’on trouve sur le chemin : les Africains, les volontaires résistants de la France Libre, sans oublier « les anars ». Ces anarchistes partis combattre le fascisme espagnol en 1936 et puis le fascisme italien dans le désert. Ceux que la France de Vichy aurait appelés des « loosers » sont en fait les « winners » de la guerre.

C’est bien la mentalité de Daniel Nevot, blessé quatre fois au combat, officier de la Légion d’Honneur. Il n’est pas fait pour perdre !

Il devient, après la guerre, maître d’armes diplômé de la célèbre École militaire d’escrime et de sports de combat d’Antibes. Et lorsqu’il prend sa retraite et s’expatrie aux États-Unis, son talent est immédiatement reconnu. Pendant 27 ans, il entraîne l’équipe junior olympique d’escrime. Il décède le 2 juillet 2019, à l’âge de 99 ans.

Mais un marsouin ne meurt pas, il rejoint les profondeurs abyssales. Pour Daniel Nevot, qui est un ancien du Régiment de tirailleurs sénégalais du Tchad, la terre est aussi son berceau. Et puis « le régiment, c’était sa vie ! » comme le dit sa fille Patricia, Il veut reposer là où est son cœur. C’est la pandémie qui freine ses dernières volontés ou alors aurait-il réussi tout simplement à faire coïncider le dépôt de ses cendres avec le quadricentenaire des Troupes de Marine ?





Daniel Nevot, un parcours exceptionnel

Né en 1920, Daniel Nevot s’engage en 1938. Il est nommé rapidement caporal et se porte volontaire pour la Norvège lors de la création du corps expéditionnaire. Échappé en Angleterre, il est un des premiers à s’engager dans les Forces françaises libres, « avec le numéro 129 » précise Patricia sa fille. À bord d’un navire britannique, il rejoint l’Afrique équatoriale française, traverse le Gabon et le Congo. Affecté au régiment de tirailleurs sénégalais du Tchad, il participe à la préparation du raid sur Koufra puis aux opérations contre le fort d’El Tag. Il participe à la prise du fort d’El Gatroum avant de rejoindre Faya.
Ayant obtenu sa première citation, il est décoré à Brazzaville par le général Leclerc avant de rejoindre Fort-Lamy pour préparer les opérations de Tripolitaine et de Tunisie.

Après le regroupement à Sabratha, il rejoint le Maroc et est affecté au 1er bataillon du RMT.
Il débarque en Normandie et participe aux combats de son bataillon, de la Normandie à Berchtesgaden en passant par l’Alsace où le RMT « encaisse ses plus lourdes pertes dues aux tirs d’artillerie intenses de l’ennemi », comme le précise le commandant en second du régiment et officier tradition.
la vidéo de la translation des cendres